Comment l’affaire « Gonzalez vs Google » pourrait redéfinir la responsabilité des plates-formes numériques


La Cour suprême américaine doit examiner, mardi 21 février, un dossier lié aux attentats de Paris qui pourrait avoir de très importantes conséquences en remettant en cause l’une des lois fondamentales qui régissent la modération des contenus sur Internet.

En 2016, la famille de Nohemi Gonzalez, une étudiante américaine tuée à 23 ans sur la terrasse du restaurant Le Carillon durant l’attaque terroriste du 13 novembre 2015, avait porté plainte contre Google, en tant que propriétaire de YouTube, ainsi que contre Facebook et Twitter. Les parents de la jeune femme, inscrite dans un cursus de design en France, reprochaient aux trois plates-formes d’avoir insuffisamment modéré, voire dans certains cas d’avoir participé à la diffusion, des textes et des vidéos de propagande de l’organisation Etat islamique, contribuant à la radicalisation des assassins de leur fille.

Les plaignants avaient été déboutés, en première instance comme en appel, par les tribunaux californiens, avant de solliciter la Cour suprême des Etats-Unis. Les juges avaient donné raison à Google et à YouTube, objet principal de la plainte. Selon eux, le géant n’avait pas manqué à ses obligations, prévues par la section 230 du Communications Decency Act, un texte fondamental qui fixe le cadre légal de la modération des réseaux sociaux aux Etats-Unis.

Compromis juridique et politique

Adoptée en 1996, la section 230 dispense les grandes plates-formes d’une responsabilité lorsqu’elles hébergent des contenus produits par des internautes et contraires à la loi, sauf si ces contenus leur ont été signalés comme illégaux. Souvent critiquée, la section 230 est un compromis juridique et politique qui a inspiré les législations en vigueur dans la plupart des pays occidentaux, dont la France.

Sans cette relative immunité, arguent ses défenseurs, aucun réseau social ne pourrait opérer : un risque judiciaire permanent les contraindrait, au mieux, à censurer préventivement la quasi-totalité des messages et, au pire, à fermer. Ses critiques estiment, eux, que le texte est interprété par les tribunaux de manière trop clémente pour les grandes plates-formes. Celles-ci, ajoutent-ils, ne seraient plus de simples hébergeurs, mais éditorialiseraient leurs services en classant les contenus et en faisant des recommandations, grâce à des algorithmes.

L’audition par la Cour suprême a fait l’objet ces dernières semaines d’une très intense activité de la part des géants du numérique et d’organisations de défense des libertés publiques, qui ont pour la plupart apporté leur soutien à Google, au nom de la liberté d’expression. Plus de 70 amicus curiae (littéralement « ami de la cour ») – des motions faisant valoir des arguments juridiques – ont été déposées, par l’Union américaine pour les libertés civiles, par des associations de défense de victimes, par l’association de la police américaine, etc.

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